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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 31 mars [18]64, [illis.]

Je t’ai vu, je t’ai baisé des yeux, tu m’as souri, je t’ai envoyé mon âme, je suis heureuse, je te bénis et je t’adore. J’espère que tu as passé une bonne nuit sans insomnie et que ta santé ne laisse rien à désirer ce matin. De mon côté, mon cher petit homme, j’emboite le pas en toute chose [illis.] en clopinant un peu comme aujourd’hui. Voilà trois jours que j’ai une bête de douleur dans le talon droit qui me fait traîner le pied et tirer la langue comme si j’y avais un boulet attaché. Mais tout cela n’est rien et je sauraia bien retrouver des jambes tantôt pour courir la prétentaine avec toi si tu avais le temps de te promener. Malheureusement et HEUREUSEMENT, car les deux choses sont également de circonstanceb en ce moment, Lacroix et Verboeckhovenc ne te donnerontd pas la clef des champs avant le jour de la publication de ton livre qui ne peut guère tarder maintenant [1]. Tout cela est dans l’ordre mais peu hygiénique pour toi, ce dont j’enrage. Pour me faire prendre courage et patience je t’aime dans mon petit compartiment à part, ce qui est encore très doux. Puis j’irai tantôt voir MES OUVRIERS de MA MAISON [2] ce qui est aussi mal intéressant et puis je reviendrai chez moi présider aux préparatifs du FESTIN de ce soir. Sais-tu, mon cher bien-aimé, que le mercredi de ton petit Toto [3] fait un grand trou dans ma semaine chaque fois qu’il me le reprend. Je suis si bien acoquinée à sa présence, à sa douceur, à son esprit, à son tout charmant que son absence est une vraie privation pour moi d’autant plus que je sens combien il te manque à toi-même, ce fils bien-aimé.

BnF, Mss, NAF 16385, f. 89
Transcription de Marie-Laure Prévost

a) « saurais ».
b) « circonstances ».
c) « Verboeckoven ».
d) « donnerons ».

Notes

[1Dans sa lettre à Auguste Vacquerie du 31 mars, Victor Hugo avoue être débordé par les envois d’épreuves : « Il y a un mois je recevais deux feuilles en quinze jours, aujourd’hui je reçois seize feuilles en vingt-quatre heures [...] Je ne puis donner les derniers bons à tirer » (CFL, t. XII, p. 1262).

[2Le 20 Hauteville, où Juliette s’apprête à déménager, est en travaux.

[3François-Victor Hugo, désormais invité régulier chez Juliette.

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