Guernesey, 25 mars [18]64, vendredi, 11 h.
Je viens d’envoyer retenir la voiture pour deux heures après-midi, mon cher bien-aimé, pensant que tu approuverais cette initiative de ma part vu l’absence d’épreuves et la présence du beau soleil. Si je me suis trompée prenez-vous en à vous-même, qui demandez toujours plaies et bosses, promenades et carrosses. Pendant ce temps-là mes servardes iront à l’office du vendredi-saint et faire un petit tour dans la grand’rue (le Longchampa de Guernesey). Peut-être aurait-il été plus sage d’emmener l’une d’elles à côté du cocher mais je craindrais d’éveiller la susceptibilité jalouse de Suzarde ou de contrister la pauvre Élisabeth qui, jusqu’à présent, ne bouge pas de la maison et est à la lettre la Cendrillon de la susdite piffe de Ténéric [1]. Pour obvier à tous ces tiraillements je n’emmènerai ni l’une ni l’autre et voilà en vraie SALOMONE [2] comment je me tire de la chituachione [3]. Je ris avec vous parce que je crois que vous avez passé une good nuit, parce que je vous aime et parce que j’espère que vous m’aimez un peu est-ce vrai ??? Je réponds pour moi, faites-en autant de votre côté et je serai la plus heureuse des Juju.
BnF, Mss, NAF 16385, f. 84
Transcription de Marie-Laure Prévost
a) « long-champ ».