Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1864 > Mars > 20

20 mars 1864

Guernesey, 20 mars [18]64, dimanche matin, 7 h. ½

Je te quittais, mon cher bien-aimé, pour surprendre au passage ton petit bonjour si charmant et si tendre. Je viens de l’avoir et le paradis est dans mon cœur car il m’a semblé à la vivacité de ta télégraphie, que tu avais passé une bonne nuit et que tu n’avais plus mal à la tête. J’espère ne pas m’être trompée et que ta santé est en harmonie avec mon amour qui n’a jamais été plus fort et plus vivace qu’en ce moment de ma vie. Il faudra tâcher de marcher un peu aujourd’hui, mon cher petit homme, en dépit des PLACARDS [1] et autres embêtements, plus fatigantsa les uns que les autres, pour empêcher le retour de ce violent mal de tête d’hier dont tu as tant souffert. Quant à moi je serai prête à l’heure que tu voudras. Mes servardes se disposant de leur côté à aller à la messe ce matin et à la recherche des pissenlits tantôt, ce à quoi je ne m’oppose pas, trop heureuse si elles pouvaient se contenter de ces innocentes distractions, je parle au pluriel quoiqu’il n’y aitb qu’un fâcheux singulier auquel ma phrase puisse faire allusion car pour la pauvre petite Élisabeth il n’y a encore rien à craindre des mauvais penchants inhérents à son état. Jusqu’à présent elle est douce, honnête et FOUAIBLE. C’estc une sécurité pour ma tranquillité mais c’est un grand inconvénient pour le service de la maison. Enfin, comme on ne peut tout avoir, et que tu veux que je sois PHILOSOPHE, je me contente du peu que me fait cette petite fille. Hélas, mon cher petit homme, je t’avais bien dit que je t’assommerais tous les jours avec les mêmes rabâchages domestiques et DE DOMESTIQUES. Tu vois que j’avais raison de vouloir garder le silence sur ce sujet afin de ne pas être débordée par ma stupide prolixité. Une autre foisd tu me croiras et tu n’insisteras plus pour avoir MES CONFIDENCES. En attendant je t’adore de fond en comble.

J.

BnF, Mss, NAF 16385, f. 79
Transcription de Marie-Laure Prévost

a) « fatiguants ».
b) « est ».
c) « Cette ».
d) « une autrefois ».

Notes

[1Allusion aux corrections des placards de William Shakespeare, mais peut-être aussi jeu de mots de Juliette sur l’aménagement du 20 Hauteville.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne