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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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11 août [1850], dimanche matin, 9 h.

Bonjour, mon petit homme adoré, bonjour, mon amour. Ah ! Dieu. Je me trompe, non, ce n’est pas ça que je veux dire : bonjour, affreux homme, bonjour, représentant de tout ce que la capitale renferme de plus hideux. Bonjour, vous pensez que ces bonjours-là sont assez bons pour vous et qu’il n’y a pas besoin de se gêner pour en chercher de plus aimables et de plus honnêtes. Comment allez-vous avec tout cela ? Votre pauvre gorge, où en est-elle ? Et cette douleur atroce que vous a faitea M. Louis n’a-t-elle pas eu de suites fâcheuses sur toute votre santé ? À quelle heure êtes-vous revenu de Saint-James [1] ? Toutes ces choses qui m’intéressent en dehors de votre scélérate de personne, quand les saurai-je ? Faudra-t-il que j’attende jusqu’à ce soir pour être tranquille sur leur compte ? Vous en êtes très capable de me laisser ignorer jusqu’au dernier moment ce qui me ferait tant de bonheur de savoir tout de suite. En attendant, je vous aime par la force de l’habitude et malgré votre abominable conduite à mon égard. Ce n’est pas ma faute, mais ce n’est que trop vrai.

Juliette

MVHP, MS a9089
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « faites ».


11 août [1850], midi

Je vais envoyer Suzanne tout à l’heure à Sablonville [2]. Je voudrais, mon cher amour, que tu ne vinssesa pas trop tard car ils m’ont instamment priée d’y être à cinq heures et demie précises. Tu sais aussi, mon petit homme, quelle difficulté on a le dimanche à trouver des voitures quelconques. Mais je te parle de distractions et presque de bonheur puisque je passerai quelques minutes avec toi, et voici que Suzanne m’apporte de mauvaises nouvelles d’Eugénie [3]. Il paraît que la pauvre femme va toujours de pire en pire. Vraiment, si je croyais que ma présence peut lui être de quelque utilité ou lui fasse le moindre plaisir, je renoncerais tout de suite et de grand cœur au diner de Mme de Montferrier. Mais, outre qu’elle a une bonne maintenant, je crois qu’elle est trop souffrante et trop abattue pour supporter la présence même d’une personne amie et dévouée comme je le suis pour elle. Tout cela me rend triste, mon bien-aimé, et me fait craindre que tu ne sois toi-même de ton côté plus souffrant qu’hier. Mon Dieu, mon Dieu, quand donc te saurai-je guéri, quand ne verrai-je plus de souffrance d’aucune sorteb autour de moi ? Quand serons-nous l’un à l’autre avec un mois de bonheur devant nous ? J’attends la réponse à toutes ces questions et je t’aime, en attendant, de toute mon âme.

MVHP, MS a9090
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « vinsse ».
b) « sortes ».

Notes

[1C’est là que la famille Hugo est en villégiature d’été.

[2C’est la campagne des Montferrier, à Neuilly.

[3Eugénie Drouet, cousine de Juliette, mourra bientôt d’hydropisie.

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